Sunday, November 27, 2005

La mode de la maison en bois

LE MONDE | 14.11.05 | 16h07 • Mis à jour le 14.11.05 | 16h07

Longtemps les Français ont délaissé la maison de bois. L'histoire populaire des Trois Petits Cochons avait sans doute trop bien ancré dans les mentalités le sentiment que cette construction végétale résisterait moins bien au vent et aux flammes que celles en pierre ou en brique. Depuis trois ans, la maison individuelle en bois est pourtant devenue le choix de coeur d'un nombre croissant de Français. Sur les 200 000 maisons mises en chantier en 2005, près de 6 000 seront construites en bois, soit 20 % de plus que l'année précédente. Ce chiffre reste modeste par rapport à l'Amérique du Nord, où 97 % des maisons adoptent ce mode de construction rapide — les différents éléments sont préparés à l'avance en usine — et à peine plus onéreux (1 100 euros du m2 environ) qu'une maison traditionnelle.


Ce nouveau goût pour la matière végétale répond à la recherche d'authenticité, de ressourcement et de rapprochement avec la nature en même temps qu'elle montre un nouveau souci de préservation de l'environnement. Cela tombe bien : avec ses 16 millions d'hectares de forêts (deux tiers de feuillus, un tiers de résineux), notre pays n'est pas dépourvu de cette ressource.

Mais la maison en bois est-elle totalement écologique ? Mieux que le métal et le verre, le bois est perçu comme le premier des écomatériaux. Il est même redevenu un objet de curiosité pour les architectes, qui l'avaient délaissé pendant les années 1980. Les vertus écologiques du bois, qui peut être utilisé dans les ossatures des maisons (charpente, poteaux, poutres), mais aussi en bardages extérieurs et en revêtements intérieurs (cloisons, parquets...) ne sont plus à démontrer.

Le bois est la plus importante matière première végétale renouvelable de la planète. "Une fois coupé, le bois lutte contre l'effet de serre en piégeant le gaz carbonique à raison de 1 tonne par mètre cube de bois coupé et stocké", affirme Georges-Henri Florentin, le directeur général adjoint du Centre technique du bois et de l'ameublement (CTBA), installé à Bordeaux. Par ailleurs, les opérations de transformation du bois en matériau de construction sont peu consommatrices d'énergie. Sur le sol, l'impact du bois est minime en raison de sa légèreté et il se marie facilement avec les paysages. Enfin, une maison de bois a moins besoin d'être chauffée qu'une maison en pierre.

Restent deux problèmes environnementaux : le traitement du bois et l'approvisionnement. Si la solidité des structures réalisées dans ce matériau est incontestable — les bâtiments haussmanniens ont, comme d'autres avant eux, prouvé leur résistance —, le vieillissement des revêtements extérieurs est plus problématique.

AVANCÉES TECHNIQUES

Dès qu'il est en contact avec l'air et l'humidité, le bois naturel est en effet confronté aux attaques des termites et des champignons. Il est donc nécessaire de traiter chimiquement les façades des habitations pour qu'elles résistent aux intempéries et au vieillissement. Or, lorsqu'il pleut, ces substances, souvent très toxiques, se répandent dans les sols. "Le bois est certes le plus écologique des matériaux pour le bâtiment, mais son traitement est aussi le plus nocif pour l'environnement", affirme Nicolas Favet, l'un des deux architectes concepteurs de la maison manifeste Eco-Logis exposée au parc de La Villette en 1998.

Des avancées techniques ont toutefois été obtenues. "Les produits qui portent le label CTB P + ont par exemple fait l'objet d'essais environnementaux", affirme M. Florentin. Des ingénieurs de l'école des Mines de Saint-Etienne ont mis au point un système de traitement par la chaleur (dit de rétification), mais qui a l'inconvénient de noircir.

"L'utilisation du bois n'est intelligente que si celui-ci provient d'une filière locale", estime l'architecte Arnaud Lacoste, chez Lode Architecture. En effet, des arbres comme le Red Cedar du Canada ou des variétés exotiques du Brésil ou d'Asie, qui résistent naturellement à l'humidité, ne proviennent pas toujours de forêts dont le patrimoine est reconstitué au fur et à mesure de l'exploitation (labels PEFC ou FSC). Et, lorsque c'est le cas, ces arbres doivent parcourir plus de 4 000 kilomètres en bateau pour venir jusqu'ici, ce qui n'est pas très écologique...

Florence Amalou
Article paru dans l'édition du 15.11.05

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